GROS
Pierre, Alain, Gaston
Né le 29 août 1932 à Nîmes (Gard) ; professeur
; militant syndicaliste, secrétaire de la section départementale
du Gard du Syndicat national de l’enseignement technique (1961-1966),
membre de la commission administrative nationale et du bureau national
du Syndicat national des enseignements de second degré (1966-1991),
secrétaire de la section départementale du Gard de
la Fédération de l’éducation nationale
(1970-1992) ; militant socialiste, adjoint au maire de Saint-Christol-lez-Alès
(Gard).
Fils
d’un voyageur de commerce devenu cadre commercial dans la
firme Saint-Gobain, d’opinion gaulliste, syndiqué d’abord
à la CGT puis à la CGC, et d’une mère
sans profession, Pierre Gros reconnaissait avoir été
influencé pour son engagement militant par son grand-père
maternel, d’origine corrézienne, syndicaliste aux PTT,
socialiste et franc-maçon (Grand Orient de France). Il fut
élevé avec sa sœur cadette suivant une éducation
traditionnelle laïque. Baptisé catholique, il fit sa
communion solennelle. Plus tard, il fut fortement influencé
par le protestantisme cévenol (traditions, culture, histoire…).
Gros suivit sa scolarité primaire au petit lycée de
filles de Nîmes de 1937 à 1943 puis effectua ses études
secondaires classiques au lycée de garçons Alphonse
Daudet, de la 7e au baccalauréat, avec un bref passage chez
les frères de l’Assomption en 1944-1945. Après
une interruption de sa scolarité en 1951, due à une
pleurésie, il obtint le baccalauréat philosophie en
1952 et entama des études supérieures à la
faculté des lettres de Montpellier. Ayant obtenu le certificat
d’études littéraires générales,
il décida de monter à Paris à la rentrée
1953. Après une année à l’Institut d’Études
politiques de Paris, Gros bifurqua vers une licence d’histoire-géographie
(mention histoire) à la Sorbonne qu’il termina en 1958.
Au cours de cette période, il dut exercer des petits boulots
variés et rencontra beaucoup de monde, au Groupe des étudiants
en Histoire et à la Cité universitaire du boulevard
Jourdan de Paris puis à celle d’Antony et commença
à militer. D’abord sympathisant du Parti communiste
français, membre de l’Union de la jeunesse républicaine
de France, il fut ensuite membre des Jeunesses mendésistes
et surtout militant anticolonialiste : il partagea avec Claude Quin*
la présidence de l’association des étudiants
anticolonialistes de la Cité universitaire internationale,
se lia avec Ahmed Ben Taleb, président de l’UGEMA qui
lança en 1956 la grève des étudiants musulmans
algériens. C’est également au cours de cette
période qu’il rencontra Janine Monnot, étudiante
en histoire, qu’il épousa à l’église
à Narbonne, le 24 avril 1957, qui devint professeur et avec
laquelle il eut deux enfants.
De 1958 à 1960, Pierre Gros effectua son service militaire
au 23e Régiment d’Infanterie en Algérie puis
en France ; sergent, il fut cassé pour indiscipline et muté
au 22e Bataillon de Chasseurs alpins à Nice. Gros enseigna
comme maître auxiliaire au lycée technique Dhuoda de
Nîmes. Devenu adjoint d’enseignement, il fut reçu
au CAPET en 1963. Affecté comme professeur certifié
au lycée technique d’Alès à la rentrée
suivante, déchargé de service à temps partiel
à titre syndical de 1967 à 1992, il ne devait plus
quitter cet établissement, où il prit sa retraite
en 1994, promu par liste d’aptitude au grade d’agrégé
en 1992. Syndiqué dès le début de sa carrière
au SNET, Gros participa au congrès national de 1961,
où il fit la connaissance de Louis Astre*, tout nouveau secrétaire
général. Ce dernier l’engagea dans le militantisme
syndical ; une longue amitié, non sans désaccords
entre ces deux fortes personnalités, fut dès lors
scellée. Gros devint secrétaire départemental
du Gard, secrétaire adjoint de la section académique
au côté d’André Liron*, il entra à
la commission administrative nationale comme suppléant en
1963, puis titulaire en 1964 sur la liste « autonome »
puis, en 1966, lors de la création du nouveau SNES, dont
Astre fut le premier cosecrétaire général,
fit partie de la CA nationale au titre du SNET et de la majorité
autonome. Il devait en rester membre jusqu’en 1992, dans la
minorité « Indépendance et Démocratie
», puis « Unité, Indépendance, Démocratie
» et enfin UID-Rénovation. Membre du bureau national
de 1967 à 1991, siégeant à la commission des
conflits, il fit la jonction entre les périodes où
se succédèrent comme leader national du courant UID,
Astre et Jacques Estienne*, et fut une sorte de cheville ouvrière
de cette tendance dans le SNES durant une vingtaine d’années,
responsable du fichier et de la constitution des listes au plan
national et dans les académies.
Personnalité à la jovialité méditerranéenne,
militant reconnu et respecté par tous, tant dans son syndicat
que sa fédération, il fut sollicité à
plusieurs reprises par Astre puis les secrétaires généraux
de la FEN (James Marangé* puis André Henry*, qu’il
rencontrait régulièrement) pour prendre des responsabilités
au niveau national mais il refusa toujours, préférant
se consacrer au militantisme dans sa région à laquelle
il était très attaché, tout en étant
membre de la CA fédérale puis du Conseil fédéral
national de 1972 à 1992. Son appartenance au Grand Orient
de France à partir de 1965, la sincérité de
son militantisme, son sens du contact humain lui permirent de tisser
un réseau de relations y compris avec ses adversaires. Proche
du Parti socialiste unifié à la fin des années
1960, partisan de l’union de la gauche, Gros fut élu
en 1965 premier adjoint à la municipalité de Saint-Christol-lez-Alès
dirigée par un maire communiste et participa à partir
de 1966 avec Liron à la direction hétérogène
de la section académique du SNES dont Pierre Antonini*, alors
militant du PSU, était le secrétaire général
de la liste B puis « Unité et Action » depuis
1957. Une longue amitié, elle aussi non dénuée
de conflits, liait les deux militants. En 1967, à la suite
du décès du maire de sa commune, ses camarades communistes
mirent la condition de son adhésion au PCF pour qu’il
lui succède à la tête de la municipalité.
Il refusa ; la campagne de dénigrement qu’ils menèrent
contre lui le blessa et dès lors, il mena le combat politique,
non seulement contre la droite mais aussi pour réduire l’influence
communiste, y compris dans le SNES, où la majorité
venait d’être conquise par « Unité et Action
», et dans la FEN.
En 1971, Gros adhéra au Parti socialiste, comme Antonini
deux ans plus tard, mais rompit définitivement avec lui pour
la cogestion de la section académique (S3) de Montpellier
du SNES ; cependant les listes académiques UID puis UIDR
qu’il constitua ne réussirent jamais à mettre
en péril la majorité Unité et Action de son
camarade de parti. En revanche, Gros s’attacha à la
reconquête de quatre sections départementales de la
FEN
sur cinq de la région Languedoc-Roussillon, dirigées
par des militants « Unité et Action », mission
confiée par Marangé à Michel Bélorgeot*
(SNES), Georges Frêche* (SNESup) et lui-même, lors d’une
réunion de militants autonomes près de Montpellier.
Les deux premiers ayant embrassé une carrière politique,
il continua de mener à bien la mission avec le concours des
militants UID du SNI. Secrétaire départemental adjoint
de la section du Gard à partir de 1963, il succéda
à Roger Bourderon* et Gautier (militants communistes) à
sa tête en 1970 et devait en rester secrétaire jusqu’en
1992. À la suite de la prise de la direction de la section
de l’Aude, dont le secrétaire, Marcel Peytavi*, était
« Unité et Action », il contesta à Antonini,
qui cumulait le secrétariat académique du SNES et
le secrétariat départemental de la FEN de l’Hérault
qu’il avait perdu et retrouvé à deux reprises
après 1968, la responsabilité de coordonnateur régional
fédéral. Ce dernier dut accepter en 1975 que Gros
assume cette responsabilité et siège au Conseil économique
et social régional et il perdit d’ailleurs la direction
de la FEN de l’Hérault en 1976. L’année
suivante, la section départementale de la FEN des Pyrénées-Orientales,
la dernière de la région à être dirigée
par un militant « Unité et
Action », rejoignit la majorité. Gros conserva la coordination
régionale de la FEN jusqu’en 1982 et eut l’occasion
de mener les actions fédérales et de faire participer
la fédération à diverses actions unitaires,
notamment la grève de soutien aux viticulteurs du Languedoc-Roussillon
en 1976, ce qui ne fut pas du goût de la secrétaire
départementale du Syndicat national des instituteurs du Gard,
Maguy Espaze*, qui approuva en revanche la grève de soutien
aux mineurs d’Alès en 1980. De façon générale,
ses relations avec les militants du SNI dans l’académie
furent cordiales et amicales. S’il entretenait de très
bons rapports avec André Ouliac*, qui eut une certaine influence
sur son militantisme, ce ne fut pas toujours le cas avec son successeur
à la tête du SNI national, Guy Georges*. Gros, fondateur
avec ce dernier d’École et Socialisme, principal animateur
dans sa région de cette association interne au Parti socialiste,
rivale de Démocratie et Université, veilla toujours
à ce qu’elle ne soit pas un outil de propagande du
projet de l’ « École fondamentale » du
syndicat des instituteurs qu’il n’approuvait pas. En
1981, il fut chargé officieusement par la FEN d’assurer
une liaison avec certains élus du PS, notamment dans une
commission chargée de préparer le projet de loi sur
les langues et cultures régionales.
Avec les lois de décentralisation de 1982, Gros s’investit
un peu plus dans le Conseil économique et social régional
où il avait obtenu la confiance du président Philippe
Lamour* et occupa une vice-présidence et la responsabilité
de président de la section Education, Sports et Culture jusqu’en
1993. En 1992-1993, à la suite de l’exclusion du SNES
et du SNEP de la FEN, Gros opta pour l’adhésion au
Syndicat des Enseignants. Son insertion dans le nouveau syndicat
et la nouvelle FEN n’en fut cependant pas facilitée,
bien qu’il ait participé dans le Gard, à la
formation syndicale d’Hervé Baro, secrétaire
national du SNI-PEGC puis secrétaire général
du SE. Il perdit sa responsabilité de secrétaire départemental
de la FEN, n’en obtint aucune dans le SE, tout comme Estienne,
et retrouva un service complet d’enseignement durant les deux
dernières années de sa carrière professionnelle.
Gros, président de l’Association d’éducation
et d’information du consommateur-FEN dans son département
depuis le début des années 1980, s’investit
alors un peu plus dans ce type de militantisme associatif et devint
président de 1994 à 1997 d’un Centre technique
régional de consommation où se retrouvaient toutes
les associations de consommateurs d’origine syndicale. Cet
engagement complétait ses autres militantismes anciens à
l’Union rationaliste, à la Ligue des Droits de l’Homme,
à Amnesty International et, depuis sa prise de retraite,
à la Fédération générale des
retraités et à l’Union des délégués
de l’Éducation nationale. Au plan politique, Gros,
qui avait été membre de la commission exécutive
départementale du PS en 1973 et en avait démissionné
en 1979 pour se consacrer à son travail syndical, militait
toujours dans son parti, assumant la fonction de trésorier
de la section de Saint-Christol.
Progressivement handicapé par une maladie pulmonaire, Pierre
Gros présidait une Association pour la poursuite de la réhabilitation
respiratoire et apportait son concours à la rédaction
de notices biographiques pour le nouveau Maitron.
SOURCES : Arch. de l’IRHSES. — Arch. de la FEN, CAMT
de Roubaix. — Presse syndicale. — Arch. et renseignements
fournis par l’intéressé. — Témoignages
oraux. — Notes de Julien Veyret.
Alain
DALANÇON
Notice du DBMOMS, tome 6, publiée avec l’accord de
l’auteur et de l’intéressé.